Deuxieme partie

Deuxieme partie

 

Enfin, il arriva, on ne sait d’où, un homme, «  bel Game briscan » (élégant, distingué), un beau Blanc qui avait les dents bleues.

Sitôt qu’elle l’aperçut, elle se mit à chanter :

 

« Dâ Nicolas, mi an missié,

I ni dents bleues, Dâ Nicolas,

Dis li entré, Dâ Nicolas ! »

 

Il la demanda en mariage. Et il lui envoyait des fleurs, des orchidées qu’il allait lui cueillir lui-même dans les grands bois.

Et Coraline était contente !

 

«  Comm’ an tit ‘z’ otolan en tê brîlée,

Comm’ an ti cabritt bois assou carrié. »

(Comme un petit ortolan dans le désert, comme un criquet parmi les pierres.)

 

Mais la maman était bien inquiète : cet homme n’était pas ordinaire ! Elle venait de s’en apercevoir à ses billets de banque qui avaient une odeur de cercueil, une odeur de mausolée.

-          Ma fille, dit-elle, voici une épingle d’or. Lorsque ton fiancé sera là, pique-le comme par mégarde. S’il sort du sang de la piqûre, c’est un honnête homme. S’il en sort de la matière     – du pus-, c’est le diable !

Coraline piqua son fiancé. Il en sortit de la « matière ».

Elle l’aimait tellement qu’elle n’en dit rien à sa mère.

-          Maman, c’est du sang qui sorti. (maman, il en est sorti du sang.)

On fit une noce magnifique. Coraline ouvrit le bal au son de l’orchestre endiablé.

On dansa le quadrille, la haute taille.

 

« Cavalier ! Prenez vos dames ! En avant deux ! violons, ronflez ! Encore une fois, chassez ! Croisez ! Balancez, faites li rond ! » Les danseurs s’échauffaient, le « petit feu » (le rhum) aidant.

« Cavaliers, prenez le vol ! »

 

Et l’on biguina ! Et l’on dansa la ghuia !